Le Café Aux Cinq Sœurs : où l’histoire côtoie la passion
Tes pieds n’ont même pas encore franchi le seuil de la porte que tes yeux traversent les vitrines de la façade tellement l’intérieur t’attire. Tu le sais déjà que tu t’apprêtes à vivre une expérience qui va t’accrocher en tête, que l’envie de revenir à Sainte-Thècle va te gagner rapidement. Tu as tellement salivé en voyant la photo du Latte crème brûlé à la torche publiée sur Instagram que tu t’es juré de venir y goûter en personne. Tu visualises ce moment depuis trop longtemps. Tes attentes sont grandes, tes papilles sont prêtes!
Tu pousses la porte, te voilà dans une autre époque. L’odeur du café se mêle à celle du bois; ça sent l’histoire, la vraie! Tes yeux ne savent plus où s’arrêter : les pâtisseries sur le comptoir, les mille et un produits d’artisans québécois qui remplissent les tablettes, les jeux de société disponibles aux clients, les bocaux vitrés remplis de bonbons, etc. À la quantité d’affaires à voir, tu te dis que tu vas y passer la journée! L’idée te plait, tu as remarqué la jolie petite terrasse de chaises dépareillées à l’extérieur. Une véritable ode à la campagne québécoise du type Pinterest!
Un menu à la craie surplombe l’immense comptoir de bois massif typique des magasins
généraux du début du 20e siècle. Tu as clairement envie de tout commander : smoothie, matcha latte, limonade Aux cinq sœurs, affogato, café froid en fût. Tu remarques que des enfants assis plus loin dégustent un milkshake décadent agrémenté d’une brochette de jujubes et de guimauves, de crème fouettée et de biscuits. Tu te maîtrises et t’en tiens à la commande de ton fameux café latté tant rêvé, en plus d’une pâtisserie de la Boulangerie Germain. Un petit « rush » de sucre bien mérité après toute cette route.
Le barista derrière le comptoir semble prendre plaisir à concocter ta commande, tout souriant, en placotant avec des habitués de la place. Le lieu a des airs de perron d’église où tout le monde se connait et raconte les derniers potins du village. Ça t’a toujours attiré cette ambiance familière là. Pas surprenant que tu aies fait un détour pour te rendre ici, en plein cœur de la Mauricie.
Le gars te remet ton café et ta brioche en prenant le temps de te demander si c’est ta première fois au Café Aux cinq sœurs. Clairement, ta réponse et l’intérêt que tu démontres l’incitent à gentiment te raconter le coup de foudre qu’on eut les propriétaires envers le bâtiment, en 2015. Pour rénover un ancien magasin général à l’abandon depuis 20 ans, disons que ça en prend en titi de l’amour… et du temps! Le gars en question, c’est le co-propriétaire de la place, Olivier Myre.
Il t’avoue que c’était un projet ambitieux, complètement fou aux dires de plusieurs dans le village. C’est que le magnifique bâtiment dans lequel tu te trouves a subi une véritable cure de jeunesse, à coup de sueur de front et de rêves plein la tête. Disons que c’était un pari ambitieux de vouloir sauver un magasin général en décrépitude d’une démolition imminente. Il te montre des photos de l’état lamentable dans lequel lui et sa conjointe, Roxanne Monfette, l’ont acheté et tu te dis qu’ils ont réalisé un véritable miracle. La persévérance, ça en prenait pour passer près d’un an à trier l’énorme quantité d’objets laissés à l’abandon, en plus de tous les travaux de rénovation à accomplir. Voir avec les yeux du cœur, ce n’est pas donné à tout le monde!
Au fil du récit, tu te rends compte que les valeurs de développement durable font partie intégrante du concept, de l’expérience nostalgique qui séduit tant les aînés (et pas qu’eux!). Il s’agit ici d’une véritable restauration authentique où des meubles ont été fabriqués à partir de bois recyclé et où d’autres ont été achetés dans des encans de la région. L’idée derrière tant d’efforts : sauvegarder l’âme du bâtiment historique.
Clairement, ce couple est visionnaire et complémentaire. Si c’est déjà un gros défi de
remettre en ordre un vieil édifice, tu te dis que ça l’est sûrement encore plus de le faire rouler à l’année, dans un village d’à peine 2500 âmes. Tu oses lui demander la recette de leur succès, ce petit « je-ne-sais-quoi » qui fait en sorte que la place est pour la plupart du temps bondée de monde. D’emblée, il te parle de leur chance d’avoir des employés fidèles sur qui compter que le roulement de personnel se fait rare. Il attribue le mérite à Roxanne qui est diplômée en administration des affaires – Ressources humaines alors que son domaine de prédilection à lui, c’est la science… du café. À l’écouter te parler avec autant d’aisance, tu te dis que son petit côté relationnel bien développé doit aussi y être pour quelque chose.
Tu te permets une dernière question parce que cette jasette te plait bien et qu’Olivier a la conversation facile : « C’est qui les Cinq Sœurs au juste? » Il te répond qu’il s’agit d’un hommage aux cinq vieilles filles de David Leblanc, qui ont opéré l’ancien magasin général jusqu’en 1996. Une véritable histoire de famille qui semble se poursuivre encore aujourd’hui, le couple étant parents de deux jeunes garçons.
De nouveaux clients font leur entrée, le moment parfait pour contenter tes papilles de cette
croûte sucrée flambée qui t’appelle depuis TROP longtemps. Tu t’assois sur une chaise berçante rouge aux allures d’autrefois, juste à côté du foyer. Au rythme des ballants, tu te délectes encore et encore. Tu ne regrettes pas une seconde ton choix de café gourmand, un goût chaleureux à l’image des visages que tu y vois.
Tu te plais à écouter les conversations des gens autour et le temps semble s’arrêter. Tu te sens dépaysé de belles façons, tu adores cette sensation. Tu te prélasses là un bon bout de temps, assez longtemps pour t’imprégner du lieu et des gens. Avant de quitter, tu achètes un sac de café de la Brûlerie Mékinoise de St-Tite parce que tu souhaites poursuivre cette expérience gustative à la maison. Aussi parce que l’achat local te tient à cœur et qu’il t’est inconcevable de repartir les mains vides face à cette charmante boutique de produits québécois. Tu te dis que tu as bien fait de prendre la route vers Sainte-Thècle, que de boire un bon café entouré de visages heureux, ça valait amplement le détour!
