«Belle à croquer», une entreprise qui n’a jamais cessé de fleurir

Depuis 2006, Valérie Buist cultive 25 espèces de fleurs et fines herbes. Elle en a récolté une entreprise florissante qui lui ressemble. Dans un quotidien qui sent bon la capucine, le calendula ou la lavande, la propriétaire de la boutique Belle à croquer sait qu’elle est exactement à l’endroit où elle souhaitait être dans la vie.

Depuis 15 ans, son quotidien se déroule entre les savons, les produits de soins corporels, les chocolats fins, les fromages, les thés ou les friandises glacées, autant de produits qu’elle a rendus uniques en y insérant les fleurs qu’elle cultive. Et elle ne s’en est jamais lassée. Par chance, car son entreprise connaît une histoire à succès qui ne se dément pas, au contraire.


De fleurs, d’air et d’espace

Dès ses débuts à Sainte-Thècle, Belle à croquer a pris un essor rapide et constant. Si bien qu’en 2018, l’entrepreneure a dû se résoudre à agrandir sa boutique en multipliant par sept l’étendue de son espace. Or, trois ans plus tard, elle se retrouve déjà à pleine capacité, et lorgne désormais les mètres carrés du garage d’à-côté pour absorber la croissance que connaît de nouveau son entreprise.

C’est que sa clientèle l’a résolument adoptée. Dès la création de cette boutique logée dans un rang éloigné de la municipalité, Belle à croquer a su attirer les adeptes et s’en faire des alliés qui ont par la suite réclamé leurs produits plus près de chez eux. Aujourd’hui, quand ils ne prennent pas la route pour gagner ce coin de campagne de la Mauricie, ils commandent en ligne ou se procurent leurs produits chouchous dans l’un des 75 points de vente qui jalonnent le Québec.

De Rouyn-Noranda jusqu’en Gaspésie en passant par Montréal et les Laurentides, les produits de Belle à croquer se retrouvent maintenant dans une quarantaine de villes au Québec, avec quelques extensions du côté de l’Ontario et des provinces de l’Ouest.

Et si on constate aujourd’hui à quel point ce type de produits séduit, les choses n'étaient pas si claires en 2006. Lorsqu’on remonte le temps, il fallait faire un acte de foi pour croire en la destinée d’une petite boutique de produits fins logée aux confins d’un petit village tranquille. C’est pourtant là que Valérie Buist s’est posée dès la fin de ses études.

Savonnière, comme son grand-père

Après une escale au Cégep de Jonquière pour étudier les arts et technologies des médias, la jeune femme a rapidement bifurqué vers l’horticulture du côté de l'Institut de technologie agroalimentaire du Québec à Saint-Hyacinthe.

À cet endroit, elle a pu constater à quel point elle vibrait d’une passion pour les plantes, pour le vivant, avec un coup de coeur encore plus grand pour les fleurs comestibles.

«Lors de mes études, j’étais portée sur ces fleurs et je me suis aperçue que c’était un domaine où il y aurait beaucoup de pertes puisque les fleurs comestibles doivent être impeccables pour que les gens aient envie de les croquer», raisonne-t-elle. «C’est là que l'idée de les incorporer à des savons m’est apparue...» Or cet environnement, non seulement elle le connaissait un peu déjà, mais il la ramenait à ses souvenirs d’enfance.

Dans le village voisin de Saint-Tite, jadis, elle avait vu son grand-père à l'oeuvre. Jean-Paul Buist, savonnier bien de son époque, offrait ses savons du pays. Elle avait vu les techniques. Elle avait ressenti le plaisir.

«Je ne suis pas une entrepreneure née. Je suis une passionnée qui a fait de sa passion un métier. J’ai fait mon modèle d’affaires en fonction de mes valeurs, de mes priorités, du rythme de vie que je voulais, avec une qualité de vie au travail pour mes employés et pour moi», dit-elle. «C’est coloré, c’est positif. Il y a un peu de mon essence là-dedans.»

 

Si elle affirme sans une once d’hésitation qu’elle se trouve aujourd’hui sur son «X», Valérie Buist s’y est largement consacrée. Depuis le début, elle travaille des semaines entières, à coup de sept jours par semaine, ce qui ne l’a pas empêchée de mettre au monde ses deux plus belles créations, deux fillettes qui ont aujourd’hui 7 et 10 ans, et qui voient dans le métier de leur mère une aventure magnifique.

Pour Flavie et Alice, cet univers est encore parfumé d’une petite aura de magie. Un jour, elles comprendront à quel point la magie a été durement gagnée. «Je suis une travailleuse, j’ai du coeur au ventre, mais avec le recul, 15 ans plus tard, je me demande comment j’ai pu faire», avoue Valérie Buist.

«Tout cela s'est fait un pas à la fois. Les défis, on les a relevés un après l’autre. C’est une montagne à gravir, mais tant que tu as des objectifs clairs, que tu regardes en avant et que les bouchées ne sont pas trop grosses, c’est du bonheur», analyse-t-elle. «Mon objectif n’a jamais été de devenir une multinationale, mon but, c’est d’avoir du plaisir en travaillant et de servir correctement ma clientèle avec mes propres standards, des standards élevés.»

Le tout accompagné d’un petit profil visionnaire. «Aujourd’hui, on entend davantage parler d’un rythme lent et d’un retour à la terre, mais il y a 15 ans, aller s'établir dans le fond d’un rang n’était pas très en vogue», reconnaît-elle. «Sainte-Thècle n’était pas ce qu’il est devenu désormais et la fleur comestible n'était pas connue comme aujourd’hui, avec la popularité des chefs...»

Belle à croquer toute l’année

Aujourd’hui, le commerce l’occupe toute l’année. Les mois se suivent et se ressemblent en termes de production, dans le rang du Chemin Saint-Michel de Sainte-Thècle.

Dès le mois de mai, la Fête des mères provoque la demande. Tout comme la période estivale et les vacances qui s'ensuivent, entre juin et septembre. Or voilà, en septembre, il faut vite prévoir les inventaires du temps des Fêtes. Fin janvier, le répit est bon, mais bref. Les points de vente sont vides, la Saint-Valentin s’en vient et l’appel de la nouveauté pour le printemps arrive rapidement. Dès février, Valérie Buist se concentre sur les nouveautés. Juste à temps pour le retour de mai. Et la roue tourne.

À ce jour, elle a la main heureuse sur le choix des produits à développer, grâce à une fine analyse réalisée avant la mise en marché. «En toute humilité, je dois dire qu’il y a peu de produits qui n’ont pas fonctionné parce qu’on a fait nos devoirs avant de lancer un produit, car le processus coûte très cher.»

Depuis quatre ans, son conjoint Sébastien a rejoint les rangs en faisant bénéficier l'entreprise de sa spécialité, la transformation d’aliments, dont les chocolats fins et une gamme variée de popsicles aux fruits et aux fleurs. Ensemble, ils ont continué d’innover, notamment avec la création d’un comptoir apothicaire vrac sur mesure, un comptoir où on sert aux clients un menu garni d’une liste de produits ou de soins. La personne pourra choisir le type de soin désiré, l’odeur qu’elle préfère, les effets recherchés. Du personnalisé, du sur-mesure.

Valérie Buist a toujours misé sur l’aspect humain de son commerce. «Les gens aujourd’hui n'achètent pas seulement un produit de qualité, ils achètent aussi un service après-vente, ils achètent notre chaleur, notre histoire, l’expérience», dit-elle. Et les onze employés de la place prennent soin de cet aspect. «Ça va jusqu’à l'expérience de l'ouverture du colis à la maison. Ça sent bon, on y a mis notre petite touche.»

Au fil de la dernière année et demie, le commerce en ligne a connu une popularité certaine. L’entrepreneure a bien sûr fait face au fameux virus qui a écarté les foules de sa boutique, mais par chance pour elle, le virus a aussi moussé la vente des savons et autres produits nettoyants.

Même en temps de pandémie, son commerce n'a jamais connu de réel ralentissement. «Il faut plutôt contenir les activités pour garder une qualité de vie», dit-elle. «Quand on s'investit, on peut perdre des plumes, une énergie, une santé mentale. Je ne me rendrai pas là.»

Aujourd’hui comme lors de la création de boutique en 2006, la ligne de conduite de Valérie Buist demeure la même, celle d'oeuvrer dans un mode de vie sain. Peut-être y aura-t-il un ultime agrandissement? Une troisième et dernière phase? Ce serait un dernier chapitre, affirme-t-elle.

Quant à la suite des choses, elle se déroulera comme le destin le voudra bien. Pour la mère de famille, le modèle à donner à ses filles, bien au-delà du succès et de la prospérité, c’est de miser sur un domaine qui les rendra fondamentalement heureuses, fait-elle valoir. Un métier qui concordera avec leurs valeurs et leurs passions. La seule manière de demeurer sur son «X».

 

* Crédit photo : Belle à croquer

Article écrit par : La Voisine